Suceava (Bucovine du Sud)
Tôt le matin, je prends le train pour Suceava (prononcer : Soutchéava). Petit choc quand je vois que la campagne qu’on traverse a revêtu son manteau blanc. C’est joli, mais les gens ne s’en émeuvent pas, novembre, il neige, normal, la vie continue ! Autre choc, thermique cette fois-ci, dans le premier train qui n’est pas chauffé. Hem. Escale à Salva, un bled paumé où j’ai 2 heures à tuer. Chose faite à l’unique épicerie/café du coin, pleine de mecs en bleu de travail qui viennent prendre la bière pré puis post déjeuner. Sur le chemin (genre les village s’étirent sur plusieurs kilomètres le long de la route principale), les gens qui bossent au jardin s’arrêtent pour me regarder passer, éventuellement taper un peu discut. Bref, train de Salva à Suceava sur-chauffé, dans un compartiment avec 5 roumains très cools, bonne ambiance et petits gâteaux de rigueur. Première impression, la ville est mi-vieille&moche, les blocs de béton s’enchainent ; mi-pseudo-moderne, avec une grande zone commerciale qui comprend Auchan, Carrefour et magasins d’ameublement. Arrivée à l’hostel, désert une fois de plus, tenu par Ciprian (polyglotte, français inclus) et Irene, genre 30 ans et trop cools. Ils m’invitent à partager leur repas du soir, patates au four, saucisse, pastèque en pot (dans du vinaigre comme les cornichons), viande, pain…
Lendemain, il neige, il neige. (Mais contrairement à la plupart de mes amis virtuels, je ne le mets pas en statut Facebook, hinhin.) Donc journée musées. Musée des sciences naturelles (où je suis rentrée par erreur, je cherchais l’autre), où un cool mec du point info touriste m’a donné pas mal d’infos sur la région. Rien d’exceptionnel, minéraux et animaux empaillés (super mal d’ailleurs), mais un cool petit vivarium avec des perruches, perroquets, canaris, tortues d’eau et … chinchillas blancs (D10Ks P2J), et cochons d’Inde !! Un Roumain qui d’après ce que j’ai compris fais sa thèse en je sais pas quoi et du coup bosse à la bibliothèque du musée m’emmène ensuite à celui que je cherchais, le Musée d’histoire, qui regorge d’un tas de trucs : des « sculptures zoomorphes » de la préhistoire aux costumes des lieutenants d’infanterie de la 2GM, en passant par la salle du trône moyen-âgeuse de je ne sais plus qui. Le truc que j’ai préféré, ce sont les lettres, joliment écrites et avec sceau rouge, s’il vous plait. Et traduites. Genre au 18ème, tel prince a écrit une lettre à tel autre pour lui demander de lui prêter 3000 francs. Ou une en mode : « Ecoute mec, là je suis entrain de construire ma citadelle, donc si tu pouvais m’envoyer ton meilleur tailleur de pierre pour faire mes statues, ça serait cool. Je te revaudrai ça, t’inquiète. » Ou encore : « Ma fille est en âge de se marier, tu connaitrais pas un mec cool, qui au passage aurait quelque terre fertile ? ». Au passage, eje découvre le centre ville de Suceava, qui est bel et bien aussi laide que ce dont elle avait l’air. Au milieu de la Piata 22 decembrie (faut quand même que je cherche ce qui s’est passé ce fameux 22 décembre), l’énorme Maison de la culture, l’architecture soviet dans toute sa splendeur. Deux restos, un MacDo et au moins une dizaine de bijouterie. C’est tout. Le reste ce sont des habitations. Plus loin, la citadelle, mais je n’y suis pas allée.
Mais la spécialité de la Bucovine, ce sont les monastères peints. Je pars donc en bus pour Gura Homorului, à une trentaine de km de Suceava. Le premier que je veux voir est à 6km de Gura H., donc en sortant du bus je demande à une dame où je peux prendre un maxi-taxi (ou mini-bus) pour aller à Humor. Elle sait pas, mais me propose de venir avec elle, elle rejoint une copine et sa copine peut me déposer car l’endroit où elles vont n’est pas loin du monastère. Cool ! Au passage, on s’arrête dans un bled prendre 2 autres personnes, une mère et sa fille. Elles sont marrantes, genre 50 ans, super copines qui rigolent beaucoup. Celle qui était dans le bus avec moi est chanteuse, elle m’offre son CD, c’est son 2ème album. Trop cool ! Dommage je vais devoir patienter car j’ai pas de lecteur CD sur mon mini-laptop. Aline, à défaut de chants de Noel on aura de la variété roumaine pour Noyel ! Le monastère itself est recouvert de fresques extérieures, datant du 16ème et plus ou moins délavées par « les outrages du temps ». L’intérieur en revanche est absolument magnifique. Un enchainement de 3 salles peintes de haut en bas. La première est assez sanguinolente car les fresques représentent les martyrs : décapitations, bûchers, engins de torture, corps démembrés et/ou transpercés par des flèches. Pas cool. Dans la 2ème salle ce sont plutôt des portraits de saints et dans la 3ème, très richement décorées de tableaux, autels, et divers trucs dorés et incrustés de pierres (précieuses ?), des scènes bibliques et Vierge à l’enfant. Dans le parc entourant le monastère, il y a aussi une petite chapelle où vont prier les quelques nonnes qui habitent ici. Là, les Madone sont vraiment étranges car sur les tableaux, les personnages (sauf visages et mains) sont recouverts d’une couche métallique dorée ou argentée, donc en gros on dirait Marie & Jésus en armure chevaleresque. C’est un peu spécial. Retour à Gura H. en stop, une charmante dame et ses 2 petites têtes blondes. Ici, pour le stop, il est d’usage de donner au conducteur l’équivalent de ce qu’aurait coûté le trajet en bus, c’est-à-dire pas grand-chose, mais en ce qui me concerne en Roumanie personne n’a jamais accepté que je lui donne d’argent… Bref, de la ville, je décide de monter à pied au monastère de Voronet, à 4 km de Gura H, car il est encore assez tôt et il parait que c’est une jolie balade. Effectivement, cool promenade de campagne, le seul truc est que les gens roulent comme des tarés sur la route de campagne. Vu qu’il n’y a pas de trottoir, en gros quand t’entends une voiture qui arrive, jette toi sur le bas-côté. A part ça, c’était joli, cf photos. Y’a même quelques pistes de ski dans le coin ! Donc le monastère de Voronet est lui aussi tenu par des Sœurs, et sur sa façade, une des plus belles fresques de Bucovine : celle du Jugement dernier. D’après mes informations : « Au sommet, des anges font rouler les signes du zodiaque pour indiquer la fin des temps. Au milieu, l’Humanité vient se soumettre au Jugement ; sur la gauche, St Paul accompagne les croyants ; sur la droite, Moïse fait avancer les non-croyants. En bas apparaît la Résurrection. » Cf photos pour tout ça. Une autre façade était censé représenter la genèse, j’ai trouvé Adam&Eve mais pas ceux que je cherchais, Abel&Caïn. A cause des outrages du temps. Sinon, les 2 monastères ont la même forme, et se ressemblent assez. L’intérieur est assez similaire aussi, 3 salles avec des peintures glauques dans la 1ère. Mais vraiment joli de dehors. Les 2 sont au patrimoine mondial de l’Unesco je crois. Retour à Gura H. en stop encore, et comme c’est dimanche c’est un peu une galère de retrouver un bus (hem, y’a personne à l’arrêt) donc le gentil monsieur me dépose à la gare, retour en train, aussi peu cher mais un peu plus long que le bus.
Lendemain, je me pointe à la gare routière, prête à prendre un billet pour Istanbul. Et puis finalement, me demandez pas pourquoi, je reviens avec un billet pour Bucarest. Tout le mal qu’on m’a dit de cette ville m’a donné envie d’y aller, c’est malin. Juste pour voir si c’est aussi grand, gris, moche et nul que ça. Je suis sure que non. Puis j’ai envie de socialisation aussi. Mais Ciprian était très cool, on a pas mal discuté aussi, on restera en contact. Donc le soir même, bus de nuit sous un ciel sur-étoilé. Mode même au planétarium y’a pas autant d’étoiles dans le ciel. Arrivée à Bucarest à 4h 30… Et la suite plus tard !